Auteur
: Katoru87 ( yuchan@modulonet.fr )
Couple:
4X1 (non, je ne me suis pas trompée de sens ^^)
Disclaimers
: Douloureux mais obligatoire, je rappelle que les G-boys ne sont
pas à moi.
Note
: Il m'a fallut six mois pour écrire et publier ce one-shot.
J'espère vraiment qu'il vous plaira.
Merci
à Okamie pour la beta-lecture.
La chute de l'ange
Il
avait l'impression que la pluie ne cesserait jamais de tomber. Des gouttes
s'écrasaient sur les fenêtres, glissant sur les surfaces vitrées en laissant de
petites traînés humides derrières elles. Quatre ne put retenir plus longtemps
le soupir d'ennui qui menaçait de sortir depuis de nombreuses minutes. D'un
geste rageur, il jeta son livre par terre. Il s'ennuyait. Depuis toujours il
s'ennuyait mais ne pouvait rien faire pour sortir de cette routine quotidienne
qui commençait à sérieusement lui peser. Pourtant il n'était pas à plaindre.
Combien de gens auraient tué pour être à sa place ? Probablement des millions !
Résidant
de la ville haute, Tanapura, il faisait parti de l'élite comme en témoignait
ses ailes d'une blancheur immaculée, et en tant que tel, il devait donner le
bon exemple. Mais c'est si difficile de donner le « bon exemple » aux
autres quand on a soit même envie de vivre comme on le désire. Sans se
préoccuper de l'opinion des autres. Un coup frappé à la porte le sortit de sa
rêverie solitaire. La seule personne capable de le distraire venait d'entrer
dans sa chambre, sa grande sœur Relena.
-
Bonjour petit frère ! Encore en train de
rêvasser à ta fenêtre ? Tu attends le prince charmant ou quoi? se moqua-t-elle
gentiment.
-
Très
spirituel ça vraiment! Si tu connais une autre activité pour faire passer
l'ennui que de regarder le paysage je suis preneur! Soupira Quatre.
-
Comment peux-tu t'ennuyer avec tout ce qu'on
peut faire dans cette maison? Tu peux aller te détendre au sauna et aller à la
piscine sans sortir d'ici! Tu peux aussi aller à la bibliothèque, j'ai entendu
dire qu'il y avait de nouveaux livres.
-
Je connais déjà tous au point même les livres ne
me tentent plus. J'ai déjà tout fait X fois. C'est ça le problème, j'ai envie
de nouveauté.
-
Je te vois venir petit-frère. Mais je ne pense
pas que se soit une très bonne idée. Tu sais ce que tu risques.
-
Toi aussi tu connaissais les risques mais ça ne
t'a pas empêché de partir à l'aventure. Tes ailes sont là pour prouver que tu
n'es pas d'une pureté inégalée !
-
Laisse
mes ailes tranquille, elles ne t'ont rien fait ! Tu penses toujours à aller
faire une excursion dans la ville basse c'est ça?
-
...
-
Je vois ! Écoute-moi, je sais que notre vie
n'est pas amusante, malgré toutes les richesses de cette demeure et tous les
avantages dont nous jouissons, mais n'oublie pas qui nous sommes, ce que nous
sommes. Nous ne pouvons nous mêler au commun des mortels.
-
Tu l'as bien fait toi ! rappela froidement
Quatre.
-
Et tu sais très bien ce que ça m'a coûté. En
sortant de Tanapura j'ai commis un très grave pêcher. Mes ailes, comme tu me le
rabâches si bien, ne seront plus jamais blanches et j'ai perdu la confiance de
notre père. Je suis constamment surveillée. J'ai perdu le peu de liberté que
j'avais et je ne veux pas qu'il t'arrive la même chose. Tu sais combien je
tiens à toi !
-
Je sais, mais je veux savoir comment c'est en
bas. Je veux le voir de mes propres yeux même si c'est la dernière chose que je
vois.
-
Tu es têtu petit frère!
-
Tu peux parler toi ! nargua le blond. Relena, je
t'en pries, aides-moi !
-
Je ne veux pas que tu sois souillé, père ne me
le pardonnerais jamais si tes ailes perdaient leur éclat. N'essaies pas de
m'attendrir c'est non !
-
Dans ce cas, tu sais où est la sortie !
-
Quatre...
-
VA-T-EN !!!
La
jeune femme s'exécuta de mauvaise grâce. Elle n'aimait pas voir son frère dans
cet état, mais lui refuser son aide était le seul moyen qu'elle avait de le
préserver. Il fallait qu'il conserve ses illusions sur la perfection du monde
l'entourant. Lui qui vivait dans le luxe et qui, malgré son sale caractère,
avait le cœur sur la main ne devait pas voir la misère des habitants d'en bas.
Il ne devait pas non plus, comme elle, tomber sous le charme de l'un d'entre
eux. La séparation avait été si dure pour elle, pourtant si forte. Non ! Il ne
fallait pas que Quatre connaisse les douleurs qui accompagnent l'amour. Il
fallait à tout prix éviter que Quatre n'apprenne la réalité de la vie, de sa
vie, dans le monde d'en bas. Mais pourrait-elle éternellement l'empêcher de
faire une bêtise ? L'empêcher de découvrir que lui et ses semblables vivaient
grâce aux multiples souffrances du peuple d'en bas? Elle en doutait, mais le
plus tard serait le mieux!
Quatre
était furieux, contre sa sœur qui ne voulait pas lui révéler comment elle avait
fait pour sortir de la cité surprotégée qu'était Tanapura et surtout contre
lui-même qui ne se sentait pas le courage, jusqu'à maintenant, de s'échapper
pour trouver seul la sortie de cette prison dorée. Mais cette fois, il en avait
assez de s'apitoyer sur son sort. Il avait beau faire, il avait beau chercher à
se raisonner, il se sentait irrémédiablement attiré par les lueurs blafardes et
vacillantes, tel des lucioles prisonnières du brouillard, venant de la ville
d'en bas quand la nuit tombait. Cette aura de mystère entourant ce lieu, si
fascinant, où il n'avait pas le droit de mettre les pieds l'appelait.
Pour
Quatre, cette ville était une incitation à la débauche. Cette même ville où se
cachait deux yeux saphirs qu'il n'avait jamais pu oublier. Et pour la première,
et sans doute la dernière fois de sa vie, il décida de succomber à la
tentation. Mais il ne fallait pas agir dans la précipitation. Le fin stratège
qu'il était se devait de bien préparer le terrain. Argent, armes et vêtements
appropriés fait pour passer inaperçu allaient s'avérer nécessaires. Décidé, il
commença sans plus attendre les préparatifs de sa sortie, oubliant le détail le
plus important, celui qui avait trahi sa sœur : ses ailes.
Plusieurs
jours plus tard, fin près, il se dirigea vers la porte de sa chambre. Sous sa
riche cape de soie blanche, des habits communs et sales; un pantalon de toile
grossière et un pull en laine bleu nuit troué en plusieurs endroits. Les voler
au jardinier n'avait pas été une mince affaire, mais il avait réussi. Une
panelle de couteau, pour le lancé ou le combat au corps à corps était
dissimulée sous son haut et une bourse en cuir usé contenant le minimum
possible de pièces d'or pendait à sa ceinture. Il valait mieux éviter d'attirer
les regards et il savait parfaitement que certaines personnes qui semblent vous
mater allègrement les fesses font en vérité une estimation de la taille de
votre porte-monnaie. N'ayant jamais vu d'habitant d'en bas, il ne savait si son
déguisement était correct, mais il avait attendu trop longtemps pour patienter
davantage.
D'un
pas sûr, il se dirigea vers les jardins. Longeant les murs, se faisant tout
petit, à peine osait-il respirer, il parvint jusqu'à la lourde grille d'acier;
l'entrée du domaine de son père. S'il sortait ses ailes, c'était fichu. Leur
aura d'une grande pureté, halo luminescent produit par ses plumes, risquerait
de le faire repérer immédiatement.
« C'est
parti pour l'escalade. Faites que je sois toujours aussi souple et agile que
quand j'étais enfant ».
Il
s'avéra, quand Quatre se releva en pestant et jurant comme un charretier, que
sa prière n'avait pas été exaucée. Le jeune garçon avait dû faire un effort
surhumain pour arriver en haut, effort qui s'était soldé par une superbe chute
quand il avait tenté de passer de l'autre côté du portail. Heureusement, il
était tombé du côté de la liberté et la joie d'être enfin dehors lui fit
oublier l'énorme bleu qu'il risquait d'avoir au bras le lendemain matin, ainsi
que la future bosse sur le coté de sa tête. Mais là, il avait l'après-midi pour
lui, et il comptait bien en profiter.
Tanapura
et la ville basse n'était reliées que par le système d'égouts. Vu d'en bas et
de loin, la ville semblait flotter alors qu'en réalité elle était bâtie sur une
falaise abrupte, impossible à escalader sans ailes, dissimulée par de vieux
immeubles abandonnés et à demi-écroulés. Personne ne venait jamais dans cette
partie de la ville, infestée par les rats. Seul quelques personnes exclues de
la société y vivaient en marge du monde extérieur, dans une misère encore plus
grande qu'ailleurs. Trouver de la nourriture était difficile, mais trouver de
l'eau était un véritable exploit. Toute l'eau potable était envoyée vers
Tanapura par de grosses canalisations rouillées trouant la terre. Il n'était
pas rare que ces canalisations soient crevées par la populace assoiffée. Voler
de l'eau était un crime, toute personne se faisant prendre par la milice
recevait vingt coups de bâton. Et gare à la récidive ! Certains chanceux
trouvait de l'eau en creusant le sol, créant des puits privés dont l'eau se
vendait une fortune.
N'ignorant
rien de ce qu'il faisait ou de ce qu'il risquait, Quatre se glissa dans l'un
des conduits menant à la ville basse. L'odeur de pourriture le prit à la gorge.
Impossible de respirer dans ce tuyau nauséabond. Mais comme il ne voulait pas
utiliser ses ailes, il n'y avait pas d'autre chemin pour descendre, aussi il
prit son courage à deux mains et s'enfonça dans les profondeurs pestilentielles
des égouts de Tanapura.
Il
avançait à tâtons dans le noir le plus complet depuis une bonne heure, il
n'aurait jamais cru que ce serait si long, avant d'apercevoir enfin un bout de
lumière. Il se précipita vers cette sortie tant attendue qui lui permettrait de
respirer à pleins poumons sans risquer de rendre son déjeuner. La lumière,
l'air enfin ! Il sortit en se tortillant dans l'étroit conduit et pour la
première fois admira le paysage de la ville d'en bas. Il correspondait
exactement à ce que sa sœur lui avait raconté; sale, en ruines, le sol était
couvert d'ordures et les murs recouverts de graffitis anarchistes ou obscènes
empestaient l'urine et les déjections. Un spectacle de fin du monde pour le
jeune élite. Et dire qu'il n'avait pas cru sa sœur quand elle lui avait raconté
ce qu'elle avait vu ! Comment pouvait-on vivre dans de pareilles conditions ?
Comment faisaient-ils ? Pour répondre à cette question, il fallait se mêler aux
habitants, mais il n'y en avait pas dans les environs. Où étaient-ils tous ?
Quatre
ne connaissait décidément rien de cet endroit qui l'effrayait désormais plus
qu'il ne le fascinait. À chaque coin de rue, une nouvelle, mauvaise, surprise
l'attendait, lui qui commençait à regretter d'être venu. Pourquoi n'avait-il
pas écouté Relena ? La jeune fille était toujours de bons conseils, pourquoi ne
l'avait-il pas écouté ?
Il
arriva enfin dans la partie habitée de la ville basse, appelée « le
bourbier » par ses habitants. L'endroit regorgeait de bars louches puant
l'alcool et la fumée des joints que se passaient les clients. Les nombreuses
prostitués s'exhibaient dans des tenues que Quatre trouvait plus effrayantes
qu'excitantes. Entre celles qui portaient des tenues moulantes en jouant avec
des fouets, celles qui avaient rayé le mot « pudeur » de leur maigre
vocabulaire, ou celles que leurs clients prenaient sur place à la vue de tous,
le jeune homme ne savait plus où il pouvait regarder. Très vite, ses yeux ne
quittèrent plus ses pieds. Il ne voulait pas rester dans un endroit où les
cadavres pourrissaient à l'air libre dans les rues ou les caniveaux. Il ne
voulait pas rester dans un endroit ou l'humain avait fait place à l'inhumain et
où les hommes sentaient naturellement le mauvais whiskey. Il voulait partir et
ne plus jamais revenir. Il ne voulait surtout pas penser à tous les risques
qu'il avait pris pour voir son rêve s'écrouler dans un torrent de boue.
Rapidement,
il revint sur ses pas. Heureusement qu'il avait toujours marché droit devant
lui, et accueillit avec soulagement la solitude qui s'offrit à lui, passé une
ligne invisible séparant l'habité de l'inhabitable. Mais quelque chose avait
changé. Il n'était plus aussi seul que tout à l'heure. Des gémissements de
souffrances se firent entendre et Quatre aperçu au loin, un groupe d'homme.
Prudemment il s'approcha. Ils étaient nombreux. Habillés de vieux vêtements
sales et troués, ressemblant au siens et ils s'acharnaient à tabasser un jeune
garçon. Ils étaient trop nombreux pour que l’élite les affronte de face. Il se
dissimula derrière un tas de gravats, prêt à intervenir.
Le
premier couteau de Quatre se ficha dans la nuque d'un des hommes qui s'écroula
par terre. Mort. Un deuxième suivit rapidement. Ni courageux, ni téméraires,
les hommes s'enfuirent à toute allure abandonnant là leur victime. Le blond
s'approcha de l'inconnu toujours à terre. Incroyable ! Ce garçon avait
apparemment le même âge que lui. Recroquevillé sur lui-même, il semblait serrer
quelque chose contre sa poitrine. Quand Quatre voulut savoir de quoi il
s'agissait, le garçon se réveilla. Il se leva lentement en gémissant de douleur
et fit face au blond. Ce dernier ne pouvait plus bouger, hypnotisé par le
regard cobalt de celui qu'il venait d'aider. Un regard si profond qu'il
semblait sonder son cœur et son âme. Le mettant complètement à nu. Le laissant
sans défense. Ne plus penser. Ne plus bouger de peur de briser cet instant
magique.
Quatre
voulut parler, mais à l'instant où il ouvrit la bouche, le jeune inconnu
s'effondra à terre, inconscient. L'objet qu'il serrait si fort dans ses bras
roula aux pieds du tanapurien. Une gourde visiblement pleine. Ainsi, ce jeune
garçon si beau, s'était fait tabasser parce-qu'il avait volé de l'eau ? Quel
gâchis ! Ne pouvant pas abandonner le garçon à son triste sort, Quatre le prit
dans ses bras //dieu qu'il était léger!// et décida de le ramener chez lui.
Pourquoi faisait-il tous ça pour ce garçon qu'il ne connaissait pas ? Que ses
pairs considéraient comme de la vermine au même titre que ses semblables ?
Parce-qu'il avait eu le coup de foudre pour lui et refusait, lui qui avait
toujours eu ce qu'il voulait, de le laisser partir.
La
remontée le long du conduit fut pénible. Quatre devait souvent se baisser et le
garçon évanouit dans ses bras ne lui facilitait pas la tâche. L'eau croupie
tout autour d'eux lui soulevait le cœur mais il fallait qu'il tienne bon. Il
tiendrait bon pour que ce garçon ne retourne pas vivre en bas. Enfin il refit
surface, retrouvant son univers et ses repères. Son chez lui. Maintenant un
autre problème allait se poser. Comment faire entrer son invité sans que
personne ne le voit ? Comment lui faire passer la grille s'il ne pouvait pas
sortir ses ailes sans se faire remarquer ? Il réfléchissait à la question quand
la chance lui sourit; la grille était ouverte. Pourquoi ? Quelle importance !
Il fit le même chemin qu'à l'aller et ne s'autorisa à respirer qu'une fois en
sécurité derrière les quatre murs de sa chambre. Ouf, il l'avait fait !
Sans
plus se préoccuper de rien, il fonça à la salle de bain pour remplir la
baignoire. Il fallait à tous prix qu'il se débarrasse de cette puanteur qui lui
collait à la peau et à celle de l'inconnu toujours inconscient. Il se
déshabilla rapidement, jetant ses vêtements directement dans la cheminée où un
feu crépitait gaiement. Ensuite, avec des gestes emprunt d'une douceur qu'il ne
se connaissait pas, il dénuda l'habitant d'en-bas découvrant un torse
légèrement musclé, des jambes et des bras minces, le tout couvert d'une épaisse
couche de crasse.
« L'eau
est rare en bas. M'étonne pas qu'il soit si sale ! »
Il
le souleva et le posa délicatement dans l'eau parfumée du bain et s'assit
derrière lui, le calant entre ses jambes et appuyant sa tête contre sa
poitrine. Il commença par lui laver les cheveux puis le reste du corps. Sans
crainte ni pudeur. Appuyant le garçon contre la baignoire, il fit de même pour
lui, remplaçant l'odeur d'égouts par une douce senteur de vanille. Il sortit le
premier, se sécha et s'habilla rapidement d'une chemise et d'un pantalon blancs
avant de s'occuper de son invité spécial.
Une
fois le brun séché et habillé de vêtements propres, Quatre l'allongea sur le
lit de la chambre d'ami, attenante à la sienne et où personne n'allait jamais.
Quatre Winner, héritier légitime de la cité de Tanapura, n'ayant pas d'ami, que
des relations amicales basées sur l'hypocrisie de ceux qui ne pensaient qu'à
grappiller encore du pouvoir en se servant de lui, n'avait pas besoin de cette
pièce. Malgré tout elle était là, lumineuse, spacieuse et surtout, elle n'avait
qu'une fenêtre impossible à ouvrir à cause de la rouille et qu'une porte
donnant sur la chambre du blond. Parfaite pour empêcher le garçon de s'enfuir.
Le garder toujours auprès de lui sans que personne ne soupçonne sa présence.
-
Je savais qu'un jour tu finirais par me
désobéir, dit tristement une voix bien connue.
-
Relena ? Comment as-tu...
Quatre
était figé, paralysé par la peur qui venait de le saisir au ventre. Une boule
douloureuse se forma dans sa gorge bloquant toute parole, à cet instant précis
il était à la merci de la jeune femme et, il n'aurait su dire pourquoi, cette
idée le terrifiait plus qu'elle ne le rassurait.
-
Je t'ai vu dans le jardin. Rassure-toi, j'étais
seule.
-
Tu vas me dénoncer ? demanda le blond, méfiant.
-
Non, je ne dirai rien. J'essaierai même de
t'aider. Mais te rends-tu seulement de ce que tu as fait ?
La
voix de la jeune femme ne cachait ni sa déception, ni son chagrin. Elle ne
pouvait approuver le choix de son frère, pour le moment, ça lui était
impossible, mais ce qu'elle pensait avait bien peu d'importance face à la lueur
farouche et déterminée brillant dans le regard de son petit-frère, le seul
membre de sa famille qui ne l'avait pas renié. Elle n'était pas d'accord avec
lui mais elle s'était juré de le protéger et elle tiendrait sa promesse, même
si Quatre agissait comme le pire des égoïstes ou des crétins.
-
Oui, et j'en suis ravi. J'ai trouvé ce garçon
dans la décharge qu'est la ville basse et je ne le laisserai pas repartir.
-
Quoi? Tu n'es pas sérieux?
Relena
n'y croyait pas. Cet tête de pioche risquait de commettre la plus grosse erreur
de sa vie. La même qu'elle: tomber amoureux d'un habitant d'en bas. En plus,
séquestrer un homme qu'il ne connaissait pas... Minute ! Un homme ? Non
seulement son frère était allé en bas, en dépit de toutes les interdictions de
leur père, mais en plus il avait l'air de s'être amouraché d'un homme ? Comment
allait-elle faire pour le protéger ? Comment cacher à tous ce que ses ailes
devaient déjà trahir ?
-
Quand j'ai vu ses yeux j'ai été happé par son
regard. Je n'ai pas pu m'en détacher. Je ne sais pas si je l'aime, mais je sais
que je ne veux pas qu'il s'éloigne de moi, que je suis sérieux dans mes
affirmations. Si tu avais vu...
-
Tous le monde verra ! En sortant de la ville, en
commettant cet acte interdit, tu as souillé ton aura et perdu la blancheur
immaculée de tes ailes. Tous le monde le verra à la prochaine cérémonie des
étoiles qui aura lieu dans un an et père te punira. Il pourrait même faire
exécuter ce garçon. En le ramenant ici, contre son grès en plus, tu l'as mis en
danger! Tu y a pensé à ça ? Tu as commis deux crimes en moins d'une après-midi
! Tu pourras peut-être, être heureux une année si tu es assez doué pour vous
cacher pendant tous ce temps, mais tôt au tard ça te rattrapera !
La
jeune femme était livide, toutes ses couleurs semblaient avoir déserté son
visage et ses yeux ne cessaient de bouger, comme pour repérer un ennemi
invisible. Ses mains, complètement crispées sur sa robe, menaçaient à tous
moment de déchirer le tissu. Les jointures de ses doigts étaient si blanches
qu'elles donnaient l'impression d'être sur le point de se briser. Fureur et panique
se mêlaient dans son regard qui semblait transpercer Quatre de part en part.
-
Est-ce que tu veux bien m'aider à garder le
secret. demanda doucement Quatre. Ses yeux trahissaient son inquiétude, il se
sentait comme un petit garçon perdu. Il avait besoin de savoir s'il pouvait
compter sur sa sœur.
-
Dans la mesure de mes moyens oui ! capitula la
jeune femme. Décidément elle ne pouvait rien refuser à ce petit bonhomme
qu'elle adorait en dépit de ses défauts. Il ne fallait pas qu'il lui arrive
malheur le temps que pourrait durer son rêve sinon, elle ne se le pardonnerait
jamais! Il faut que j'y aille. Je compte sur toi pour être prudent.
Heero
se sentait bien, pour la première depuis longtemps. Il ne savait pas où il
était mais c'était doux, chaud et agréable. Il ne voulait pas se réveiller
complètement tant il craignait que ce ne soit qu'un rêve. Rester dans un
demi-sommeil pour en profiter le plus de temps possible.
Un
mouvement près de lui le tira de cette douce torpeur. Mais où avait-il dormi ?
Que s'était-il passé la veille ? Méfiant, il ouvrit un oeil cherchant à se
repérer, mais il devait se rendre à l'évidence; il ne savait ni où il était, ni
comment il était arrivé là. Il ne se rappelait que d'un étrange jeune homme de
son âge aux cheveux blonds comme le soleil d'été et aux yeux bleu clair. D'où
venait-il ? Il ne l'avait jamais vu avant et pourtant il connaissait tous ceux
qui vivaient dans cette partie du bourbier! Où pouvait-il bien être maintenant?
Il continua son inspection des alentours.....Il était là, l'étrange blond était
là, maintenant, debout, devant lui, un sourire aux lèvres et un plateau repas
dans les mains.
-
Content de voir que tu es réveillé. Tu as dormi
pendant deux jours. Ces types qui t'ont frappé ont vraiment dû y aller fort.
-
Qui êtes-vous ? demanda doucement le jeune homme
brun, intimidé par le regard azur posé sur lui. Qu'est-ce que vous me voulez?
Pourquoi je suis ici?
-
Je m'appelle Quatre Winner ! Et je ne te veux
aucun mal?
-
C'est ce que dise les violeurs!
-
Je ne savais pas que j'avais la tête d'un
violeur!
-
Qu'est-ce que vous me voulez? Heero se leva du
lit, méfiant. Ce jeune homme au regard trop clair n'était pas comme lui et ça
le mettait mal à l'aise.
-
Rien. Tu t'es évanoui après que ces brutes t'ont
passé à tabac. Je ne pouvais pas te laisser là.
-
La solidarité n'existe pas entre étrangers!
Heero s'approchait lentement de la porte.
-
Il faut croire que si. Sourit Quatre. Comment tu
t'appelles?
-
Qu'est-ce que ça peut vous faire? Lâcha le jeune
homme brun en haussant les épaules.
-
Je veux juste savoir! Ça ne t'engage à rien tu
sais.
-
Heero ! Finit par souffler le jeune homme, un
peu rassuré par l'immobilité de son vis-à-vis. Un vrai violeur n'aurait pas
perdu de temps à lui demander son nom, ni à attendre son réveil. Il le savait
par expérience.
-
Heero comment ?
-
Je ne sais pas. Juste Heero.
Comment
pouvait-il ne pas avoir de nom de famille? C'était impossible.... Tout le monde
en avait un. À moins que... qu'il n'ait pas de famille! Il avait vu où et
comment vivait Heero et il ne pouvait plus douter que les orphelins devaient
être nombreux en bas. Heero était donc....
-
Où suis-je ? Continua Heero, coupant Quatre dans
ses réflexions.
-
Je pense qu’il vaut mieux que tu ne le saches
pas. Tu as faim ? demanda Quatre afin de détourner la conversation vers un
sujet moins dangereux pour tous les deux.
-
À votre avis sachant que je n'ai pas mangé
depuis plusieurs jours. Persifla Heero, en regardant Quatre droit dans les
yeux.
Sans
plus attendre, le blond tendit son plateau au garçon et l'éloigna rapidement de
la porte dont il était un peu trop proche. Il l'aida à se rasseoir sur le lit
sans rien renverser et s'installa à côté de lui. Heero était complètement
perdu. La dernière fois qu'il avait été conscient, il se demandait où il allait
pouvoir dormir pour se protéger du froid et ce qu'il allait pouvoir se mettre
sous la dent et aujourd'hui, il se réveillait dans une magnifique chambre aux
couleurs pastel, dans un lit chaud et douillet avec un jeune homme qui lui
donnait à manger. Non! Pas un homme! Un ange! Il n'y avait qu'un ange pour
s'intéresser à un orphelin crasseux et affamé comme lui. Pour la première fois
de sa vie, quelqu'un s'intéressait à lui, acceptait de lui donner un peu de
chaleur humaine. Cette bonté risquait fort de ne pas être gratuite mais il
était prêt à en accepter le prix. Si seulement il pouvait ne plus jamais
partir. Son sauveur était si beau en plus de sa gentillesse.
-
Heero?
-
Hum?
-
Que dirais-tu de rester ici ?
...
Le jeune homme en lâcha sa tartine. Avait-il bien entendu ce qu'il souhaitait
entendre? Il venait bien de lui proposer de rester ici ?
-
Heero, je ne te cache pas que j'ai eu le coup de
foudre pour toi. Je ne veux pas que tu partes et je suis prêt à t'enfermer pour
que tu restes, mais je préfèrerais que tu sois d'accord. Tu es un humain pas un
esclave. Si tu veux partir, je ne te retiens pas, mais je ne te laisse que
quelques secondes pour partir. Le temps que je change d'avis et que je décide
de t'enfermer à vie dans cette chambre.
Quatre
parlait avec une franchise désarmante et Heero put lire toute sa détermination
dans son regard bleu ciel braqué sur lui. Malgré la proposition qu'il venait de
lui faire il savait que son bienfaiteur ne le laisserais pas repartir. Que le
délai serait toujours trop court pour atteindre la porte. Il n'avait jamais
connu ça, et jusqu'à ce jour, le « luxe » et la
« richesse » étaient des mots dont il ignorait le sens aussi, il
n'avait même pas besoin de peser le pour et le contre pour savoir que son choix
était déjà fait. Il resterait aussi longtemps qu'il le pourrait. Aussi
longtemps que les pupilles d'azures posées sur lui continueraient de briller
pour qu'il reste.
-
Personne ne m'attend, je n'ai rien qui
m'appartienne. Vivant ou mort ça ne fait aucune différence. Si je peux vous
être utile, je reste. Quatre soupira de soulagement: il restait. Il voulait
sincèrement rester avec lui et c'était tout ce que le tanapurien demandait.
Mais...pour l'instant je ne peux pas vous rendre vos sentiments. Je n'ai jamais
cru au coup de foudre, dit très sérieusement le brun.
-
Je ne te demande pas de m'aimer. Reste avec moi
et ne me pose aucune question. C'est tout !
Heero
acquiesça avant de s'en retourner à ses tartines et son bol de café. Il avait
tellement faim que les questions qu'il se posait au sujet de son bienfaiteur
viendraient plus tard. Quatre laissa le jeune garçon, il avait des obligations
et il ne pouvait pas les oublier.
Une
fois son repas avalé, Heero sortit de son lit et fit le tour de la chambre.
Elle était grande et richement meublée; un grand lit à baldaquin qu'il savait
doux et confortable, une armoire dont les portes étaient finement sculptées, un
bureau orné d'une fine marqueterie et la chaise assortie était installée sous
la seule fenêtre de la pièce. Il tenta de l'ouvrir mais le loquet était cassé
et le système d'ouverture rouillé. Impossible d'aérer la pièce. Mais était-ce
si important ? Il ne savait pas où il était mais si il était toujours dans
« le bourbier », l'air de l'extérieur risquait d'être tous sauf frais
avec en bonus gratuit une forte et pénétrante odeur de putréfaction. Il se
dirigea vers la porte. Celle-ci n'était pas fermée. De l'autre côté, il entra
dans une pièce deux à trois fois plus grande que sa chambre entièrement peinte
en blanc. Qui était ce jeune homme blond pour vivre dans un tel luxe ? Il
s'approcha de la fenêtre et put voir au travers des carreaux, qui semblaient
réellement fais de cristal, le plus luxuriant des jardins. Jamais il n'avait vu
un tel spectacle. Jamais il n'avait vu un arbre tout court d'ailleurs, même
s'il savait à quoi ça ressemblait grâce aux descriptions qu'il avait pu lire
dans les rares livres qui lui étaient tombés entre les mains. L'homme qui
l'avait élevé, Odin Lowe, lui avait appris à lire. La dernière fois qu'il s'était
senti bien, Odin était vivant. Autant dire que ça remontait à une éternité !
Flash-back:
Une
petite menotte tire le pantalon d'un homme. À côté de cet enfant qui tente de
le retenir, il est un géant. Un géant au yeux tristes et aussi gris qu'un ciel d'orage.
-
Odin ? C'est quoi lire ? Et comment on fait pour
lire ? Demanda le petit garçon, une moue boudeuse sur son visage sale et un
doigt posé sur ses lèvres, signe révélateur chez lui d'une intense réflexion.
Il était si minuscule dans ses vêtements trop grand et rapiecés, si minuscule
comparé au géant qu'il tirait par la jambe de pantalon, trop petit pour
atteindre la manche de son blouson. Si minuscule avec ses cheveux ébouriffés et
la petite griffure ornant sa joue gauche. Si minuscule.
L'homme
ne s'attendait pas à une telle question, et surtout pas dans la bouche d'un
enfant aussi jeune.
-
Pour lire petit, il faut un livre. Dit-il,
toujours aussi prosaïque.
-
C'est quoi lire ? répéta l'enfant. J'ai déjà vu
un livre. C'est ce gros truc lourd plein de feuilles couvertes de signes
bizarres ?
-
Oui. Lire c'est le meilleur moyen de s'évader de
la réalité, c'est...
-
Apprend-moi à lire ! supplia le petit garçon.
Et
le géant s'était exécuté sans plus de commentaire.
Fin flash-back:
Odin
lui manquait. Il ne l'avait jamais considéré comme son père, ni lui comme son
fils mais le géant lui manquait. Il aurait tellement aimé l'entendre l'appeler
« petit » encore une fois. Rien qu'une fois. Mais c'était impossible,
Odin était mort depuis longtemps et lui n'était plus petit. Effet du temps qui
passe.
-
Je suis contente de voir que tu es réveillé !
Heero
fit volte-face si brutalement qu'il manqua tomber par terre. Devant lui se
tenait une ravissante jeune femme blonde. Ses yeux étaient moins beaux, moins
bleus, que ceux de son sauveur mais il dégageaient plus de sagesse. Quelque
part, il retrouvait Odin dans les yeux de cette inconnue. Il lui fit
immédiatement confiance, lui qui avait oublié jusqu'à l'orthographe de ce mot.
Depuis la mort de son protecteur il n'avait plus jamais fait confiance à
personne et il savait que ça lui avait plusieurs fois sauvé la vie.
-
Qui êtes-vous ?
-
Je m'appelle Réléna. Je suis la sœur de Quatre
et je veillerai sur toi quand mon frère sera absent.
Quatre
avait donc une famille? Il avait beaucoup de chance, encore plus qu'Heero ne le
croyait jusque là.
-
Veiller sur moi ?
-
Personne ne doit savoir que tu es ici. Je n'ose
te dire ce qui se passerait si ta présence venait à être découverte.
-
Mais où suis-je à la fin ?
-
Il ne te l'a pas dit ? Tout compte fait, ce
n'est pas plus mal.
La
jeune femme sourit doucement.
Heero
avait envie de la croire. Il ne poserait plus de questions. Tôt au tard, il
apprendrait la vérité.
Quatre
était dans la lune et n'écoutait pas un traître mot de ce que lui racontait son
professeur. Maintenant, il savait ce qu'on lui cachait et il savait où se
situaient les mensonges. Jamais les habitants d'en bas n'avaient été heureux.
Ils n'avaient même pas de quoi manger à leur faim et l'eau, nécessaire à la
survie, était un produit de luxe dont le vol pouvait conduire à la peine
capitale. Ils ne vivaient pas non plus dans les belles maisons que ses
professeurs et son père lui décrivaient depuis qu'il était tout petit. Il
s'était imaginé qu'ils vivaient presque comme lui, mais dans des habitations
plus petites. Quelle blague ! Ils se considéraient chanceux de vivre dans un
dépotoir du moment qu'ils avaient un toit au-dessus de la tête. On lui avait
décrit un véritable « Eldorado » alors qu'ils vivaient dans la
misère, le désespoir et le désœuvrement le plus total. Il s'était bien fait
avoir de croire à toutes ces bêtises. Quand il prendrait la place de son père,
les choses changeraient ! Mais pour l'heure, il ne pensait qu'à une chose :
aller retrouver Heero et se plonger dans les profondeurs marine de son regard.
« ...nous
pouvons donc remarquer que la forte hausse du prix de.... » La voix
nasillarde de son professeur était un bruit de fond passablement agaçant. De
plus, il avait l'impression que les aiguilles de l'horloge tournaient au
ralenti exprès pour l'ennuyer. Si seulement il n'avait pas eu toutes ces
maudites obligations ! Il ne lui restait plus qu'une seule solution pour tenter
de ne pas s'endormir; laisser vagabonder son esprit vers la seule personne qui
occupait ses pensées. La seule personne capable de le faire vraiment se sentir
vivant. Heero!
Heureusement
que Réléna veillait sur lui… Mais était-ce une si bonne idée ? Réléna lui avait
raconté son histoire d'amour impossible. Et si elle tombait amoureuse de Heero
? Et si elle tentait de le lui prendre ? Et si Heero voulait partir avec elle ?
Soudainement inquiet et furieux, il se précipita hors de la salle de classe
sous les cris incrédules de son maître.
-
Maître Quatre, où allez-vous comme ça ? Votre
leçon n'est pas terminé ? MAÎTRE QUATRE !!!!!!
-
Je reviens, il faut absolument que j'aille aux
toilettes ! mentit le jeune homme.
Un
autre pêché à ajouter à la liste. Ses ailes devaient être grises maintenant !
Il
courut sans s'arrêter, bousculant quelques personnes sur son passage,
bredouillant à chaque fois de vagues excuses, il fallait qu'il empêche sa sœur
de lui voler son homme ! Il stoppa net. SON
homme? Heero ne lui appartenait pas alors pourquoi utiliser un possessif pour
parler de lui ? Devant la porte de sa chambre, il se sentit stupide. Il
connaissait ce garçon depuis à peine quelques jours et il le voyait déjà comme
sa chose. Il avait demandé à sa sœur de s'occuper de lui en son absence, ça ne
signifiait pas qu'elle tenterait quoi que ce soit. Ne lui avait-elle pas jurer
de le protéger ? Il avait un peu honte d'avoir douté de sa sœur mais il devait
reconnaître une chose : sa jalousie.
Bon,
puisqu'il était là, autant vérifier que tout allait bien. Il poussa la porte et
entra. Sa jalousie était vraiment stupide. Reléna et Heero étaient juste en
train de parler autour d'un thé et de gâteaux. Son entrée ne passa pas
inaperçue.
-
Quatre ? Que fais-tu ici ? Tu devrais être en
cours de sciences politiques renforcées !
-
Je sais mais je me m'inquiétais. Heero, ça va tu
n'as besoin de rien ?
-
Non ! C'est gentil de vous inquiéter mais
mademoiselle Réléna m'a déjà fourni tous ce dont j'avais besoin.
-
C'est à dire pas grand chose ! plaisanta
la jeune femme. La liste se résumait à des livres.
-
Je suis surpris d'apprendre que tu sais lire
Heero, avoua Quatre.
-
Je dois être un cas rare. C'est mon père adoptif
qui m'a appris. Il disait que c'était le moyen le plus sûr pour fuir sa réalité
pour un monde meilleur.
-
Il disait ? demanda Quatre
-
Il est mort quand j'avais dix ans. Une épidémie
s'est abattu sur le bourbier. Odin a dépensé ses dernières économies pour me
payer le vaccin. dit tristement Heero.
Il
se souvenait si bien de l'agonie de son protecteur. Le géant aux yeux gris
était mort dans ses bras en lui faisant promettre de se battre pour vivre, pour
survivre. Et son « petit » avait réussit. Il avait survécu pendant
six ans à sa mort et pour la première fois de sa vie il pouvait penser:
« je vis » ! Un très beau jeune homme l'avait pris sous son aile et
une jeune femme lui avait demandé qu'il la considère comme sa propre sœur.
Heero
ferma les yeux, serrant si fort qu'il en avait mal, et pria les dieux pour
qu'ils le laissent goûter ce bonheur et cette tranquillité qui s'offraient à
lui.
_ _
_
Cela
faisait déjà deux semaines qu'Heero vivait chez Quatre. Sa vie était désormais
si simple. Il ne sortait pas de la chambre sans que Reléna ou Quatre soit là,
sinon sa porte était fermée à clé. Quand Quatre rentrait le soir, il lui
racontait sa journée et ils passaient la soirée ensemble. De son côté, le blond
avait de plus en plus de mal à contrôler son désir pour Heero. Ses nuits
étaient des cauchemars, savoir le jeune homme, si vulnérable, aussi près de lui
le rendait fou. Plus les jours passaient et plus Heero se dévoilait à lui, se
montrant d'une fragilité si émouvante que Quatre devait se retenir de le
prendre dans ses bras pour le bercer jusqu'au matin. Quand il rentrait le soir,
il trouvait souvent le jeune garçon couché devant la cheminée en train de lire
et chaque soir Heero l'accueillait avec un immense et chaleureux sourire qui
chamboulait le cœur du blond. Au départ, il avait seulement désiré le petit
brun, mais petit à petit les sentiments arrivaient et Quatre avait un peu de
mal à tout gérer. Il lui avait juré qu'il ne le toucherait pas sans son accord
mais c'était de plus en plus difficile pour lui de tenir sa promesse. Heero
était si mignon et si attendrissant. Combien de fois s'était-il enfermé dans sa
salle de bain pour imaginer les mains d'Heero sur son corps frustré ? Combien
de fois avait-il joui seul dans sa douche? Combien de fois ses propres mains
avait remplacé celles d'Heero ? Trop de fois au goût de l'élite tanapurienne
qu'il était, mais il ne voyait pas d'autre solution. Il avait juré à son
protégé que jamais il ne le toucherait sans son accord, et jamais promesse ne
lui avait paru aussi difficile à tenir. Une réelle torture ! Il devait faire
des efforts incroyables pour ne pas se jeter sur Heero quand celui-ci se
léchait les lèvres après avoir bu son chocolat du matin. Et ce n'était que
l'une des nombreuses occasions de la journée qui mettait les nerfs du blond à
rude épreuve.Sa patience fut encore mise à l'épreuve durant plusieurs semaines.
Un
soir il rentra particulièrement énervé. Son père et ses professeurs l'avaient
sacrément agacé, mais comme d'habitude tous s'envola dés qu'il croisa un regard
couleur de saphir, aussi profond que le bleu des océans qu'il avait vu en
peinture sur les murs du palais. Un jour, avec Heero, il irait en voir un de
ses propres yeux!
-
Bonsoir Heero ! Tu as passés une bonne journée ?
demanda-t-il comme tous les soirs. Réléna n'est pas là ?
-
J'ai passé une très bonne journée grâce à
votre...
-
Heero !
-
TA sœur, corrigea prestement le jeune homme qui
avait du mal à tutoyer spontanément son protecteur. En regardant l'horloge elle
a vu que tu n'allais pas tarder et elle est partie. Ça doit faire deux minutes.
Et toi? Tu as l'air épuisé et...furieux!
-
Ce n'est rien ! Mon père et mes professeurs
m'ont un peu trop forcé la main aujourd'hui, ce que je ne supporte pas. En plus
j'ai un tas de devoirs à faire et cette perspective ne me réjouit pas du tout.
-
J'aimerais pouvoir t'aider, avoua Heero la tête
basse.
Quatre
avait beau faire il se sentait toujours inférieur à lui. De toute façon il
l'était et il était inutile de jouer la comédie.
-
Tu le peux!
-
Comment ?
Le
ton du garçon trahissait toute sa surprise.
-
Peux-tu aller me faire couler un bain?
-
Tout de suite ! s'empressa de répondre Heero,
heureux de pouvoir être utile à celui qu'il considérait un peu comme son
maître.
Plusieurs
minutes après, l'élite se plongea avec délice dans l'eau chaude et parfumée
préparée par son amant. Non ! Ce n'était pas son amant. Il ne devait pas le
considérer comme tel sinon il n'arriverait plus jamais à se contrôler en sa
présence. Il le prendrait encore et encore, sans jamais que son plaisir, son
désir soit assouvit. Il...
Il
soupira et plongea la tête sous l'eau, il fallait absolument qu'il se sorte
toutes ses pensées de la tête avant que son corps n'ait une réaction peu
avouable. Il sortit de la baignoire et se sécha rapidement, enfila une chemise
de nuit, blanche comme ses autres vêtements, et rejoignit Heero dans le salon.
Ce dernier regardait danser les flammes dans la cheminée. Les reflets du feu
jouaient sur sa peau, la rendant encore plus dorée, et dans ses yeux, leur
donnant une lueur diabolique et attirante. Presque érotique ! Il était encore
plus beau que d'habitude et le blond regretta de n'avoir pas prit une bonne
douche froide. Il crut mourir de honte quand, en baissant les yeux, il vit sa
chemise se soulever à cause d'un désir un peu trop marqué. Le jeune homme au
yeux bleus, ayant entendu un gémissement étouffé, tourna la tête dans la
direction de son compagnon et rougit à son tour.
-
Heero, je suis désolé ! souffla honteusement
Quatre.
-
De quoi ?
-
De ça ! Je ne t'ai jamais caché que je te
désirais mais là, c'est plus possible. Je refuse que tu me quittes mais je ne
vais plus pouvoir me retenir très longtemps. Je vais me coucher. Le sommeil
était son seul échappatoire !
-
Tu as honte de me désirer? Demanda Heero, un peu
dépassé par les évènements.
-
S'il n'y avait que ton corps que je désirais. Je
ne veux plus n'avoir que ça! Dit Quatre très sérieusement. Ce que je veux
maintenant, c'est toi tout entier, ton corps, ton cœur, je voudrais même
posséder ton âme. Mais c'est trop! Sur ce, bonne nuit Heero. Il s'avança
doucement, embrassa le front du jeune garçon et se dirigea, presque en courant,
vers son lit.
Alors
qu'il s'apprêtait à se glisser dans ses draps, il se retrouva plaqué contre un
corps chaud et légèrement plus petit et menu que le sien : le corps d'Heero. Il
ne réfléchit plus laissant le contrôle à ses sens, basculant le jeune homme sur
son lit.
Cette
nuit là, il put dominer le garçon comme il en avait si souvent rêvé et cette
fois ses mains stimulaient un autre corps que le sien. Celui qu'il voulait
depuis si longtemps.
Heero
lui, ne savait pas ce qu'il éprouvait pour celui qu'il pouvait désormais
appeler son amant. Il l'aimait ça il le savait, mais était-ce l'amour avec un
grand A ou de la simple amitié ? Ou même du respect et de l'admiration ? Il
l'ignorait, il était perdu. Quatre le voulait et il avait tant fait pour lui
qu'Heero lui offrît son corps, sans regret et sans honte, en attendant d'être
en mesure de pouvoir lui offrir plus. Car Quatre n'était pas comme les autres.
Il ne voulait pas que son corps, il le lui avait dit et il le croyait de plus,
s'il n'avait voulu que ça il l'aurait pris il y a longtemps sans se préoccuper
de lui. Ce soir il s'était offert au blond sans qu'il le force, là était la
nuance. C'était lui qui l'avait voulu et pas Quatre.
Au
petit matin, deux êtres, heureux et épuisés, dormaient blottis l'un contre
l'autre dans le grand lit à baldaquin de l'héritier de Tanapura.
_ _
_
Le
jeune homme ouvrit les yeux, dévoilant deux perles azures et observa les
alentours. Personne, bien sûr ! Qui se promènerait dans sa chambre à une heure
pareille ? Le seul bruit venant rompre le silence de la nuit était la
respiration calme et régulière d'Heero, profondément endormi dans les bras de
Quatre. Ce dernier relâcha doucement son étreinte et sortit du lit sans faire
le moindre bruit. Il ouvrit la porte d'un de ses placards et en sortit une
tenue pour le moins étrange si l'on considérait son sexe et sa position
sociale; un uniforme de servante dont le tablier était entièrement recouvert de
sang séché. La robe l'était probablement aussi mais sa couleur noire
dissimulait les tâches. Toujours sans le moindre bruit, il sortit un gros sac
de sous son lit, le jeta sur son épaule et se dirigea, chancelant un peu sous
le poids supplémentaire, vers les broyeurs de Tanapura. Ceux-ci étaient très
facile d'accès, de grands bâtiments gris tous identiques situés au bord de la
falaise tanapurienne et avaient l'avantage de ne pas être surveillé.
Les
rues étaient désertes. Quatre se faufila jusqu'au broyeur principal sans mal et
y jeta son fardeau sans hésitation. Les gigantesques lames réduisirent en
miettes le sac et son contenu en quelques secondes dans un épouvantable bruit
de chair déchiré et d'os broyés, se recouvrant par la même occasion de tâches
rouges sombres et gluantes; du sang coagulé.
Quatre
regarda le cadavre disparaître sans remord. Cette femme n'était plus un danger
à présent. Personne ne lui prendrait Heero ! Il y veillerait !
Flash-back:
Heero
faisait une chose qu'il n'aurait jamais cru possible à peine quelques mois
auparavant; il lisait un livre que Quatre lui avait offert dans une chambre
propre et confortable. Ni Réléna ni Quatre n'étaient là pour lui tenir
compagnie, briser sa solitude, aussi, il était enfermé dans sa chambre. Il ne
comprenait pas pourquoi Quatre refusait que quelqu'un d'autre le voit. Comment
pouvait-il seulement se douter que le jeune homme blond avait menacé sa propre
sœur pour l'empêcher de trop s'attacher à lui? Comment pouvait-il savoir que
Quatre avait interdit à quiconque de pénétrer dans la chambre d'ami, sa
chambre, sous peine de passer de vie à trépas ?
Bien
sûr, cette interdiction, ce tabou autour de la pièce titillait la curiosité des
servantes. Et Heero risquait à tout moment d'en pâtir! Il était en plein milieu
d'un passage un peu soporifique et commençait à piquer du nez, quand deux voix
féminines se firent entendre à travers la porte. Deux voix inconnues!
-
Je te dis qu'on ne risque rien! Personne ne
saura ce qu'on va faire et puis toi aussi tu veux savoir ce que cache maître
Quatre. Non?
-
Si mais, je ne veux pas risquer ma vie pour
quelque chose qui risque de n'être qu'une broutille. J'admire ton courage
Alexia mais pas ta stupidité et si tu veux désobéir ce sera sans moi. Et puis
de toute façon comment veux-tu rentrer? La porte est fermée à clé!
-
Je te présente la meilleure cambrioleuse du
Bourbier. Comment crois-tu que j'ai pu survivre aussi longtemps en bas?
-
Tu veux dire que tu vas crocheter la porte?
-
Tout juste Auguste!
-
Bien dans ce cas, au revoir. J'irai assister à
ton exécution ! fit la deuxième voix en s'éloignant rapidement, presque en
courant.
-
Trouillarde ! nargua la première voix, celle de
la dite Alexia.
Heero
commença à paniquer en entendant un objet tourner dans sa serrure. Quatre
devait avoir une bonne raison de le cacher aussi il fallait qu'il respecte sa
volonté. Mais où se cacher? Il n'eut guère le temps de la réflexion. La porte
s'ouvrit sur une jeune femme aux cheveux noirs, grande et mince. Elle aurait pu
être belle si une large cicatrice toute boursouflée n'avait pas occupé toute sa
joue gauche. Son visage avait dû être tailladé à coup de couteau.
Alexia
se figea en voyant le garçon. Son maître cachait un habitant d'en bas dans ses
appartements. Cette révélation lui vaudrait une sacrée promotion ! Elle rêvait
déjà à sa future notoriété chez les domestiques quand un violent coup s'abattit
à l'arrière de sa tête. Puis ce fut le trou noir. Réléna se tenait derrière la
jeune femme inconsciente, un vase brisé dans les mains. En voyant cette petite
traînée dans la chambre d'Heero son sang n'avait fait qu'un tour et c'est sans
réfléchir qu'elle s'était emparé du premier objet lui tombant sous la main.
Elle avait juré de protéger le jeune homme et elle s'était fait le serment de
protéger son frère. Quoi qu'il lui en coûte!
-
Heero, va prendre une douche pour te calmer !
dit doucement la jeune tanapurienne avec un calme presque effrayant.
Heero
lui obéit immédiatement. Il avait eut tellement peur des conséquences de sa
découverte...
Une
fois Heero dans la salle de bain, Réléna fonça chercher son frère. Celui-ci
profitait d'une de ses rares pauses, assis seul sur un banc dans le jardin, au
soleil de cette fin de matinée.
-
Quatre ! cria presque Réléna.
-
Mmh?
-
Une domestique est entrée dans la chambre
d'Heero et elle l'a vu. Il faut nous débarrasser d'elle ! chuchota-t-elle.
-
Où est-elle ? demanda sèchement le blond.
-
Je l'ai enfermée dans la chambre d'Heero. Lui il
est sous la douche, il ne se doute de rien.
Sans
perdre une minute, ils rentrèrent dans le palais. En arrivant dans la chambre,
ils purent constater que la servante n'avait toujours pas recouvré ses esprits.
Il fallait la faire taire et pour cela, une seule solution s'offrait à eux; une
exécution rapide et sans bavure. La confiner au silence à jamais. Joignant
leurs mains, Quatre et Réléna lancèrent ensemble une forte dose de leur
pouvoir, sous la forme d'une boule d'énergie, sur la jeune femme à demi
défigurée. Son corps fut secoué de violents spasmes tandis que les dernières
gerbes électriques retournaient au néant. Elle était morte dans son sommeil,
sans souffrir, du moins ils voulaient le croire, et ils partageaient tout deux
le poids de ce meurtre. Ils partageraient aussi les remords, mais il n'y aurait
aucun regrets. Une fois de plus leurs ailes risquaient de s'assombrir. Ces amas
de plumes, de chaire et d'os qui réagissait à l'aura de leur possesseur. Si
l'âme de ce dernier était pure les ailes étaient blanches, mais à chaque pêché
commis, elle devenait de plus en plus grises. Elle trahissaient leur
propriétaire plus sûrement que ne le faisaient les effets d'un sérum de vérité
et désormais ils étaient tous les deux coupables ! Ils pouvaient se donner
bonne conscience en se disant qu'ils l'avaient fait pour Heero mais ça ne
changeraient rien au fait qu'ils avaient tué quelqu'un. Réléna, elle, savait
que pour protéger son amant, Quatre n'hésiterait pas à massacrer une population
entière et elle se rendit compte avec horreur, que s'il le lui demandait elle
serait prête à l'aider. Elle oublierait ses remords pour protéger le bonheur de
son frère et par conséquent, protéger Heero.
_ _
_
Heero
laissait l'eau chaude couler sur son corps comme si elle avait le pouvoir
d'emporter avec elle toutes ses craintes, toutes ses interrogations. Cette
fille lui avait vraiment fait peur et l'expression de son visage quand la porte
s'était ouverte lui avait confirmé qu'il n'avait rien à faire là. Mais où
était-il? Et qui était réellement ce jeune homme à qui il s'offrait presque
chaque nuit et qui faisait toujours, sans qu'il sache pourquoi, battre son cœur
plus vite que d'ordinaire ?
« Comment
crois-tu que j'ai pu survivre aussi longtemps en bas ? »
Cette
phrase revint d'un coup à la mémoire du brun. En bas ? Ça voulait dire qu'ils
étaient en haut ? Et en haut c'était le ciel, c'était la pureté, c'était la
richesse. C'était Tanapura ! Il était donc à Tanapura. La ville blanche où
vivaient des anges. Les dirigeants de ce monde. Et Quatre était donc l'un
d'entre eux. Et Réléna aussi! Il réfléchissait encore et toujours. Winner, il
avait déjà entendu ce nom quelque part avant de rencontrer son amant.
Flash-back:
Un
petit garçon sert fort la main d'un géant aux yeux bleus. C'est le jour de la
fête des étoiles qui a lieu tous les quatre ans et au court de laquelle les
tanapuriens montrent leurs ailes au habitants d'en bas, depuis un balcon
utilisé spécialement pour cette occasion, pour montrer qu'eux sont purs et donc
dignes de vivre en haut. Le petit garçon est impressionné, il n'a jamais vu
autant de monde au même endroit et le bruit l'étourdit. D'un coup le silence se
fait. Treize Kushrenada Winner, dirigeant de Tanapura vient de faire son
apparition et à ses côtés, un enfant de l'âge du petit garçon perdu au milieu
de la foule. Il est blond et semble fragile. Mais il est le fils d'un chef, il
ne doit pas montrer sa faiblesse! Tout comme son père il déploie ses ailes,
d'une blancheur immaculé, lumineuse alors que celles de son père sont
légèrement grises. Les adultes ne peuvent être aussi innocent que leurs
enfants. Le chef prend la parole.
-
Habitants d'en bas, aujourd'hui est un grand
jour! Pour la première fois de sa vie, mon fils Quatre Winner assiste à une
fête des étoiles, dit-il d'une voix incroyablement puissante en désignant le
garçonnet blond aux yeux bleus près de lui. Saluez votre futur maître!!!
Et
devant les yeux ébahis et émerveillés du petit Quatre, des milliers de
personnes se prosternèrent à ses pieds. Dans la foule, un petit garçon ne
comprend pas pourquoi il doit s'incliner devant un enfant de son âge, alors il
reste debout et fixe cet être a qui il devra obéissance. Les regards des deux
enfants se croisent.
L'un
est surpris que quelqu'un ose ne pas s'agenouiller devant lui, mais n'ose rien
dire tant le regard bleu profond du petit rebelle l'attire.
L'autre
est rassuré, car dans les yeux du petit blond il ne voit que douceur et
gentillesse. Une promesse d'un monde meilleur pour l'avenir.
Fin flash-back:
Il
chancela dans la baignoire. Il vivait depuis plusieurs mois à Tanapura, sans
s'être rendu compte de rien, et pas chez n'importe qui, chez l'héritier de la
ville. La deuxième personne la plus puissante au monde, Quatre Winner. Comment
avait-il pu oublier celui qui lui avait donné l'illusion que les choses
changeraient ? Ce petit garçon, tremblant presque, qui lui avait donné envie de
tout envoyer promener et de gravir les marches menant au balcon de cérémonie
pour le consoler. Il avait détruit la pureté des ailes de celui qu'il aimait.
Oui qu'il aimait il pouvait se l'avouer, à présent que la vérité venait
d'éclater devant ses yeux, il n'était plus à une révélation près. De quelle
couleur pouvait bien être les ailes de Quatre maintenant ? Combien de mensonge
avait-il dû inventer pour le protéger, pour qu'ils restent ensemble ? Pourquoi
était-il venu se souiller dans le bourbier sachant que chez lui c'était un
pêché ? Il fallait qu'il sache !
Fin flash-back:
Aussi
discrètement qu'il était arrivé, Quatre sortit du bâtiment abritant le broyeur
et s'enfonça dans la nuit. Il avait hâte de retrouver la chaleur, le réconfort
et la protection des bras d'Heero.
_ _
_
Quatre
mâchonnait distraitement son stylo sans écouter un traître mot de ce que son
professeur voulait lui enseigner, pourtant, il était passionné par la politique
mais il n'avait vraiment pas la tête à ça aujourd'hui. Depuis quelques semaines
déjà il était tourmenté. Quand il rentrait dans ses appartements le soir,
accueillit par le magnifique sourire de son ange tous ses soucis s'envolaient
comme balayés par la pureté du regard d'Heero. Mais ses inquiétudes revenaient
au galop quand le jeune homme qui partageait sa vie lui racontait sa journée,
car le mot qui revenait le plus souvent était « Relena ». Et il était
jaloux. Jaloux de tout ce que sa sœur faisait découvrir à son amant, de tous
ces moments qu'ils partageaient, car il n'était pas là et que seul sa sœur
pouvait tenir compagnie à Heero, de tout ce qu'ils se disaient, de toutes ces
conversations auxquelles il ne pouvait participer. Et il se haïssait, dans ses
moment de jalousie, de détester sa sœur. De l'accuser, dans le secret de son cœur,
de vouloir le séparer de son amour. Mais n'était-ce pas ce qu'elle cherchait à
faire ? Peut-être qu'elle voulait gagner sa confiance et ensuite lui voler le cœur
d'Heero. Peut-être qu'ils avaient une liaison quand il n'était pas là. Pourquoi
n'y avait-il pas pensé avant, cette fille qui disait vouloir les protéger
voulait en fait les séparer ! Mais non, jamais Réléna ne ferait une chose
pareille car elle savait trop bien combien il était douloureux de se voir
arracher l'être aimé. Que faire ?
_ _
_
-
C'est pas vrai, la plus romantique de toutes les
chansons c'est « the well you look tonight » ! scanda Réléna en
servant à Heero une nouvelle tasse de thé.
-
Je l'aime beaucoup mais je trouve que la mélodie
de « The way we were » est nettement meilleure, contra Heero en
portant à ses lèvres la douce boisson chaude.
La
porte s'ouvrit violemment sur un Quatre échevelé et visiblement furieux de
trouver sa sœur et son petit-ami en train de rire comme s'ils étaient ensemble.
Heero était à lui! Il lui appartenait! Seul lui avait le droit de le voir rire,
sourire ou pleurer! Et seul lui pouvait être le responsable de ces réactions!
Personne ne le lui prendrait! Personne ne les séparerait! Il se rua sur Réléna.
-
Mais Quatre qu'est-ce que tu fais ? cria la
jeune femme, complètement paniquée.
-
Je protège ce qui m'appartient! Dit le jeune
homme furieux.
La
jalousie déformait ses traits, d'angéliques ils étaient passés à démoniaques.
Même ses yeux n'étaient plus les mêmes mais Réléna avait trop peur pour
analyser correctement ce qu'elle voyait. L'aura de haine que dégageait son
frère la fit reculer; avait-il l'intention de la tuer?
Il
la saisit violemment par le col de sa robe et la jeta dehors sans ménagement.
Sa tête heurta durement le mur d'en face et elle s'écroula par terre, assommée
par la violence du choc. Sans s'émouvoir de l'état de sa grande sœur – elle
n'avait eu que ce qu'elle méritait! - il claqua la porte et se retourna vers
Heero. Ce dernier était encore sous le choc de la scène qui venait d'avoir lieu
sous ses yeux. Pourquoi Quatre venait-il de jeter dehors la seule personne en
qui ils pouvaient avoir confiance ? Qu'avait fait la jeune femme pour mériter
un tel traitement ? Est-ce que Réléna allait bien?
Il
était complètement perdu. Quatre s'avança vers lui d'un pas conquérant, le
saisit par le bras et le jeta sur son lit sans autre forme de procès.
-
Quatre??? cria le jeune garçon, terrifié.
-
Tu es à moi!
La
première fois, Heero s'était donné à Quatre pour lui prouver sa reconnaissance,
ensuite par amour. Il était tombé sous le charme du jeune homme si doux et
possessif qui l'avait sorti du bourbier. Il l'aimait. Mais ce soir là, pour la
première fois, il s'offrit parce-qu'il avait peur. Son amant semblait furieux
et blessé. Il agissait comme s'il voulait réaffirmer un quelconque pouvoir sur
lui, marquer à jamais son territoire dans les profondeurs de sa chair. La
terreur annihila chez Heero toutes sensations de plaisir si bien que lorsque
son amour s'écroula sur lui, apaisé et rassasié, il se rendit compte, sans
surprise, qu'il n'avait pas joui.
_ _
_
Réléna
ouvrit difficilement un oeil. Son frère n'y était pas allé de main morte pour
la mettre dehors. Mais qu'avait-elle bien pu faire qui ait pu le froisser à ce
point?
« Je
protège ce qui m'appartient! »
Il
parlait de Heero? Sûrement, car seul le jeune homme était capable de faire éprouver
de réels sentiments au blond. Positifs ou négatifs. Même elle, elle n'y
arrivait pas toujours, devant souvent se contenter d'un petit sourire
faussement amusé ou réellement ennuyé. Et dire que son frère disait d'elle,
quelques mois plus tôt, qu'elle était la seule personne capable de le
distraire. Tu parles!
Le
« bourbien » occupait une telle place dans sa vie que l'héritier de
la cité refusait, désormais, que quiconque le voit ? Quatre avait découvert la
jalousie en même temps que l'amour. Mais il n'y avait pas que de la jalousie
dans le regard de Quatre quand il l'avait mise à la porte. La jeune femme avait
eut le temps d'y réfléchir et ce qu'elle y avait vu était une réelle lueur de
folie. Un folie grandissante, envahissante. Heero rendait, bien involontairement
elle le savait, son frère fou. Être tout le temps sur le qui-vive pour qu'ils
ne soient pas découverts. Commettre pêchés sur pêchés pour protéger son plus
précieux trésor, souillant ainsi sa pureté originelle, assombrissant toujours
plus ses ailes. La journée, toujours penser à lui au point d'en oublier tout le
reste et l'aimer à en mourir une fois la nuit tombée. Et cette peur. Cette
angoisse constante qu'ils soient découvert et séparés par quelque chose de
beaucoup plus fort qu'une simple distance. D'être rattrapés par tous les
interdits et tous les tabous du monde. La peur de se retrouver seul alors qu'on
a découvert le bonheur auprès de quelqu'un. Quatre perdait pied. Il ne se
raccrochait plus qu'à Heero, son dernier point de repère. Il était sa bouée de
sauvetage. Jamais il ne le laisserait partir!
La
fête des étoiles était dangereusement proche. Presque un an qu'Heero n'avait vu
personne d'autre qu'eux deux et il ignorait probablement toujours où il se
trouvait. C'était sans doute mieux pour lui. Mais Réléna était inquiète. Heero
était devenu un deuxième petit frère pour elle. Elle priait chaque soir pour
que les deux jeunes hommes vivent heureux le plus longtemps possible, mais
est-ce que leur relation survivrait à la prochaine cérémonie? Les ailes de
Quatre étaient-elles encore suffisamment claires pour que personne ne se rende
compte de rien? Ou du moins pour que personne ne fasse de commentaires? Elle en
doutait. Combien Quatre avait-il commis de crimes pour garder Heero auprès de
lui ? Trop. Et elle n'était pas plus innocente que lui. S'il était coupable,
elle l'était aussi et ils tomberaient tous ensemble. Elle continuerait de les
protéger, de les soutenir, quoiqu'il lui en coûte, car de toutes façons, elle
n'avait plus rien à perdre.
_ _
_
Quatre
se dégoûtait autant qu'il ne comprenait pas. Il avait violé Heero. Il n'avait
mis aucune tendresse dans ses gestes, lui qui d'habitude faisait attention à
son amant, il ne l'avait même pas embrassé. Ça avait été juste du sexe.
Sauvage, bestial et même violent. Rien d'autre. Et il se haïssait pour ça. Et
il ne comprenait pas pourquoi Heero dormait collé à lui, recherchant sa chaleur
et sa...protection? Est-ce qu'il l'aimait encore malgré ce qu'il lui avait
fait? Allait-il lui pardonner? C'était impossible! Et pourtant le jeune homme
brun dormait à point fermé et n'avait jamais cherché à se dégager de ses bras.
-
Tu ne dors pas?
Ce
n'était pas une question mais une simple constatation. Heero s'était réveillé
et, devinant les tourments de son amant, il avait brisé le silence pesant qui
régnait dans la chambre.
-
Je suis désolé! souffla Quatre, les yeux humides
de larmes mal contenues.
-
Je sais, répondit simplement le jeune homme,
désireux d'oublier cette histoire.
-
Pourras-tu jamais...me pardonner?
-
Je crois que c'est déjà fait. Je n'ai pris aucun
plaisir pendant l'acte de tout à l'heure. Mais je me suis senti mieux dés que
tu m'as pris dans tes bras. Ne refais plus jamais ça! Ne me refais plus jamais
ça! Dit Heero en prenant le blond dans ses bras.
-
Je te le promet, jura Quatre en embrassant
passionnément le jeune homme. Un baiser mouillé au goût de larme.
Comment
pouvait-il ne pas lui en vouloir ?
-
Et Réléna ?
Quatre
s'assombrit aussitôt.
-
Elle ne remettra plus jamais les pieds ici. Tu
es à moi tu m'entends. À MOI!!!! Elle veut juste nous séparer mais je l'en
empêcherai. Je tuerai tous ceux qui s'approcheront de toi! Je...
Quatre
criait, gesticulait, frappait même un ennemi invisible. Pour le calmer Heero
fit la seule chose qu'il savait être efficace, il se jeta au cou de son ange et
celui-ci se calma instantanément pour mieux profiter de l'étreinte qui lui
était offerte.
-
Je ne verrai plus Réléna, dit doucement Heero,
car c'était la seule chose à faire. Je ne la verrai plus.
_ _
_
Une
fois de plus, Heero était complètement seul, enfermé dans sa chambre. Depuis
que Réléna ne venait plus le voir, il passait toutes ses journées prisonnier
dans cette petite pièce, à s'ennuyer. Les conversations de la jeune femme lui
manquait mais il ne voulait rien dire à Quatre. Ne serait-ce que prononcer le
nom de sa sœur le mettait dans une rage folle. Il n'avait plus rien à lire.
Plus rien à compter, il connaissait exactement le nombre de petit carreaux de
faïence qui avaient été nécessaires à la réalisation de la mosaïque qui ornait
son plafond ou le nombre de lattes qui composaient son plancher. Il ne pouvait
sortir, la porte étant fermée et la fenêtre impossible à ouvrir. Il passait ses
journées à guetter le bruit de la clé dans la serrure qui, tel un gong, lui
annonçait la fin de cette captivité forcée. Mais cette mélodie salvatrice ne se
faisait jamais entendre avant le couché du soleil, aussi, quand il l'entendit
en plein milieu de l'après-midi, Heero fut tétanisé. S'était-il passé quelque
chose? Que risquait-il ? Il reprit un peu de son sang froid quand la porte
s'ouvrit, dévoilant Réléna. La surprise fut telle qu'Heero se retrouva la
bouche ouverte, comme un poisson hors de l'eau qui attend de savoir à quelle
sauce il va être mangé.
-
Réléna, mais que....
-
Ne dis pas un mot et fais-moi confiance. Je
t'expliquerai tout plus tard!
Elle
saisit le poignet du jeune homme et l'entraîna dans la salle de bain de Quatre.
Là elle ouvrit la fenêtre et poussa son ami dans le jardin avant de le
rejoindre. Ils étaient dissimulés dans les buissons qui se trouvait sous la
fenêtre de la salle d'eau. À l'abri des yeux et des oreilles indiscrètes,
Réléna entreprit d'éclairer la lanterne du brun.
-
Mon père a été mis au courant de
« l'étrange conduite de son fils » par les professeurs de Quatre. Il
a décidé de mettre les points sur les « i » en allant lui parler. Si
jamais il sait que la conduite de son fils a un quelconque rapport avec ta
chambre et qu'il veut y jeter un coup d'œil, il vaut mieux que tu n'y sois pas.
-
Pourquoi tu fais ça pour moi ? Et Quatre, tu y
as pensé ? Il va être furieux s'il apprend que quelqu'un m'a vu et aidé. A plus
forte raison si c'est toi. Je ne veux pas qu'il t'arrive la même chose que la
dernière fois. Il t'a quand même jeté dehors. Je me rappelles encore que tu
t'es effondrée au pied d'un mur parce-que la violence de la collision t'avais
assommé.
-
Ne t'inquiète pas pour moi. Il a beau être
impressionnant voire violent quand il se met en rogne, il ne me fait pas peur
du tout. Je lui ai juré que je vous aiderais et c'est ce que je fais, avec ou
sans son accord.
-
...Merci
! murmura Heero.
Elle
le prit dans ses bras et tous deux partagèrent la chaleur de cette étreinte,
amicale et réconfortante. Sa meilleure amie lui avait manqué !
_ _
_
Quatre
avait vraiment l'esprit tranquille. Heero était enfermé, il l'attendait.
Personne pour le voir. Personne pour trahir son secret, sauf Réléna, mais il
savait, malgré tout, qu'elle ne le ferait pas. Il pouvait vraiment se
concentrer sur son cours de politique appliqué comme il le faisait un an
auparavant. Alors qu'il devait résoudre un conflit virtuel particulièrement
délicat, travaux pratique oblige, la porte de la salle de classe s'ouvrit à la
volée, livrant le passage au seigneur de la cité, Treize Kushrenada. Cet homme
en pleine force de l'âge avait conservé la beauté de la jeunesse; des traits
fins sans être féminins, des cheveux chatains et soyeux, de grands yeux bruns
et une stature imposante mais atlhétique, et les années lui avaient donné ce charisme
incroyable auquel personne ne résistait. Cette maturité et cette force qui le
distinguait de ses sujets. Les jeunes filles se retournaient toujours sur son
passage et les garçons, jaloux, grinçaient des dents. L'attitude du père alarma
le fils. Pourquoi son père avait-il l'air aussi préoccupé ? Un problème avec
les habitants d'en bas ?
-
Quatre, il faut que je te parle et ça ne peux
pas attendre ! Tes professeurs m'ont dit que ces derniers temps, tu étais
toujours dans la lune. Que ta concentration laissait à désirer et que tes
résultats scolaires en souffraient. Toujours d'après eux, il semble qu'il y ait
une petite amélioration depuis quelques jours mais je tiens à tirer cette
affaire au clair. Alors que peux tu me dire à ce sujet?
-
Je ne comprend pas de quoi vous parlez, mentit
Quatre.
-
Vraiment ? Et si je te parle de cette terreur
que tu as imposé aux servantes au sujet de ta chambre d'ami ? Ça non plus ça ne
te dit rien ?
Quatre
donnait l'impression d'être parfaitement serein, alors qu'en réalité, il était
aussi tendu qu'une corde de violon prête à se briser dans un couac tonitruant.
Son père l'avait-il découvert ? Heero allait-il bien ? Était-il en sécurité ?
Tant de questions. Pourquoi personne ne voulait lui donner de réponse?
-
Et puis qu'y a t’il de si important dans cette
chambre ? continua Treize sans se rendre compte de la tension qui habitait à
présent son fils et héritier.
-
Rien du tout ! répondit trop précipitamment
Quatre pour que cela semble vrai.
-
Dans ce cas, nous allons vérifier ! Tu n'y vois
pas d'inconvénients puisqu'il n'y a « rien du tout » !
Le
cœur du jeune élite sauta un battement. Il ne pouvait rien dire car cela aurait
eu l'air encore plus suspect s'il avait protesté. Il était piégé. Que
pourrait-il dire pour justifier la présence d'Heero dans cette chambre ? Il ne
pouvait dire la vérité, à savoir que ce jeune homme était son amant depuis
plusieurs mois et qu'il ne pouvait, ni ne voulait, vivre sans lui. Mais quoi
d'autres alors? Les deux hommes arrivèrent dans les appartements du plus jeune
beaucoup trop vite au goût de ce dernier qui n'avait pas eut le temps
d'inventer une excuse. Tant pis! Il improviserait. Treize s'approcha de la
porte de la chambre et l'ouvrit sans la moindre difficulté. Il y fit un tour et
ne put que constater le vide de cette pièce. Il sortit pour rejoindre son fils,
lequel était livide. Où était Heero? Comment avait-il pu sortir? Pourquoi
était-il sortit?
-
Bien explique toi maintenant, si cette pièce est
vide pourquoi en interdire l'accès aux servantes ?
Quatre
sursauta. Qu'est-ce qu'il allait bien pouvoir inventer? Il entra dans la pièce,
cherchant une excuse. Il l'a trouva rapidement.
-
À cause de ça! dit-il en pointant du doigt un
tableau, un portrait d'une jeune femme brune et aux yeux clairs.
-
Le portrait de ta mère? Pourquoi vouloir le
cacher? J'en ai fais mettre partout dans le manoir pour que personne ne
l'oublie jamais alors je ne vois pas l'intérêt de cacher celui-là.
Vite
il fallait qu'il trouve quelque chose!
-
C'est le seul portrait où on voit maman de face
! dit le jeune homme.
« maman »
Jamais
il ne l'avait jamais appelé « mère », ils étaient trop complice pour
cela. Dieu qu'elle lui manquait.
-
C'est vrai. Je n'avais pas remarqué mais tous
les autres sont de trois quart ou de profils.
-
C'est mon trésor!
-
Je vois ! marmonna Treize.
Il
comprenait très bien. Lui qui avait aimé sa femme à en perdre la raison il
savait combien ce portrait devait être précieux pour son fils, car c'était tout
ce qui leur restait d'elle mis à part des souvenirs. Son fils faisait comme
lui. Comme lui-même faisait avec le tableau qu'il gardait dans sa propre
chambre; un portrait en pied caché derrière un rideau. Un nu. Sa si belle
épouse, Une, partie trop tôt. Une partie de lui était morte en même temps
qu'elle et l'avait suivie dans l'au-delà. Tôt ou tard il la rejoindrait pour ne
plus jamais la quitter.
-
Père?
-
Il n'y a rien ! lâcha Treize en essuyant
discrètement une larme qui roulait sur sa joue. N'oublie pas que la fête des
étoiles aura lieu la semaine prochaine. Commence à te préparer car une fois de
plus, tu seras présenté comme le futur dirigeant de Tanapura. Tu devras faire
honneur à ton père.
Il
ébouriffa tendrement les cheveux de son fils et quitta la pièce pour aller
s'accorder une petite pause dans sa chambre. Il avait besoin d'un tête à tête
avec un certain tableau.
Quatre
se retrouva seul dans sa chambre. Il se demandait encore comment il avait fait
pour s'en sortir quand l'absence de son beau captif lui revint en mémoire. Il
sortit de la petit chambre en courant et se cogna en plein dans...Heero. Il
venait de repasser par la fenêtre mais sans Réléna, elle avait préféré que son
frère ne la voit pas. D'ailleurs tous les deux avaient mis au point un petit
mensonge pour expliquer les faits au blond possessif et jaloux.
-
Où étais-tu? cria presque Quatre en se jetant
sur son brun pour l'embrasser, retrouvant avec bonheur la douceur de ses lèvres
offertes.
-
Quelqu'un a apprit que ton père devait venir te
rendre visite en cours. Cette personne est venue me prévenir, a glissé une clé
sous la porte et m'a dit où je pourrais me cacher.
-
Qui est cette personne ? demanda Quatre,
soupçonneux. Les seules personnes à avoir la clé de cette chambre sont moi
et...Réléna!!! Tu as vu Réléna? Elle t'as parlé? Cette garce est entrée dans ma
chambre pendant mon absence?
Il
secouait violemment Heero pour le faire parler.
-
Je suis désolé! Heero commença à pleurer et son
amant se reprit.
-
Pardonne moi. Je ne supporte pas l'idée que tu
puisses aimer, parler, rire ou être avec quelqu'un d'autre que moi. Je t'aime!
-
Tu es tellement jaloux. Quand comprendras-tu que
c'est de toi, et de toi seul que je suis amoureux? Je ne veux pas te perdre. Je
ne veux pas te quitter. Je suis prêt à passer ma vie enfermer dans cette
chambre pour être à tes côtés. N'en veux pas à Réléna. Elle nous a rendu un
grand service, chuchota Heero à l'oreille de son amour.
-
Peut-être, mais ça ne veut pas dire que
j'accepte qu'elle recommence à venir te voir. JAMAIS!
L'héritier
de Tanapura serra son amant contre lui et le guida jusqu'à la chambre d'ami. Il
ferma la porte et l'allongea sur le grand lit qui n'attendait plus qu'eux. Une
fois de plus, il partit à la découverte de ce corps dont il était complètement
dépendant et qu'il connaissait pourtant par cœur. Tendrement, il déshabilla son
amour, son ange, redécouvrant avec l'émerveillement de la première fois la
couleur ambrée de sa peau douce comme de la soie et sa fine musculature. Il
avait tellement envie de lui qu'il avait l'impression que jamais il ne serait
rassasié.
_ _
_
Quatre
quitta le lit une fois sûr que Heero dormait. Il remonta les draps sur lui,
dissimulant jalousement le corps nu de son si précieux amant. Il ramassa ses
vêtements, éparpillés aux quatre coins de la chambre et s'habilla rapidement.
Son prochain cours allait commencer et il ne pouvait le rater malgré l'ennui
que cela lui procurait. Il ferma soigneusement la porte à clé et partit en
direction de la pièce qui lui servait de salle de classe. Il marchait
tranquillement, la fête des étoiles à des lieux de ses pensés, quand il surprit
une conversation très....surprenante.
_ _
_
Treize
aperçu Réléna au bout du couloir. Depuis qu'elle avait désobéi à toutes les
règles de la cité et était descendu dans la ville basse, il ne lui parlait
plus. Elle l'avait trahi. Mais une tâche violette sur la pommette de la jeune
femme attira son attention.
-
Réléna qu'est-il arrivé à ta joue?
-
Père? S'étrangla presque l'intéressé réellement
surprise que son père lui adresse la parole.
-
Qu'est-il arrivé à ta joue? Répéta froidement
Treize
« Ma
joue? De quoi parle-t-il? Oh! Zut, le maquillage a dû partir quand Heero et moi
étions dans les buissons! » pensa-t-elle.
-
Rien du tout. Je me suis juste cognée dans une
porte.
Elle
n'allait quand même pas dire que son propre frère l'avait jeté hors de sa
chambre par jalousie. Surtout qu'il faudrait expliquer l'objet de la jalousie.
-
Je vois! Dit simplement le seigneur de la ville
haute, semblant ce satisfaire de cette explication.
_ _
_
Quatre
était estomaqué. Malgré ce qu'il lui avait fait, sa sœur continuait de le
protéger. Il ne la méritait vraiment pas. Mais il ne pouvait non plus contrôler
sa possessivité maladive. S'il voulait la protéger de lui-même et de sa
violence, il valait mieux lui interdire de revoir Heero.
Il
lui faudrait donc vivre avec le sentiment d'avoir commis une injustice envers
sa sœur, mais une injustice commise pour son bien et un certain regard cobalt
annihilait ses plus sombres scrupules. Il avait déjà tué pour Heero et il
n'hésiterait pas à recommencer, même s'il fallait assassiner un membre de sa
propre famille.
_ _
_
Réléna
se regarda tristement dans le miroir. Aujourd'hui était le jour de la fête des
étoiles. Le jour où, elle le savait, le rideau tomberait sur le dernier acte de
l'histoire d'amour de Quatre et Heero. Mais qu'elle en serait la fin? Seul les
dieux à qui ce jour était dédié auraient pu le dire. Elle avait si peur! Elle
se souvint de la fin de sa propre histoire, le seul amour de sa vie. Si
seulement elle pouvait avoir la chance de l'apercevoir, aujourd'hui, parmi la
foule réuni au pied du balcon de cérémonie.
Flash-back:
Ils
s'embrassèrent une dernière fois. Les gardes de Tanapura n'allaient pas tarder
à venir la chercher. Cela faisait une semaine qu'elle était recherchée. Elle
venait de vivre les plus beaux moments de sa vie et n'avait aucun regret. Si,
un seul! Que ces moment se terminent! Qu'on la sépare de ces magnifiques
pupilles aussi noires que la nuit qui l'avaient conquises dés le premier regard
et de cette peau aussi douce que de la soie. Elle se sépara du corps chaud
collé contre le sien, quitta ces bras protecteurs dans lesquels elle se sentait
si bien et partit à la rencontre de son destin. Elle n'avait pas le choix.
-
Adieu Wufei. Je t'aime.
Elle
ne se retourna pas, car elle savait qu'elle n'aurait pas le courage de rentrer
si elle le regardait une dernière fois. Elle disparut du champ de vision du
jeune bourbien.
Fin flash-back:
Les
réjouissances se terminaient par l'apparition au balcon, seule et unique
occasion pour les habitants d'en bas de voir leur dirigeants et au cours de
laquelle les tanapuriens devaient montrer leurs ailes. Comme dans le conte pour
enfant avec la chèvres et ses chevreaux, ils devaient montrer
« pattes » blanches et c'était le moment que la jeune femme redoutait
le plus.
_ _
_
Quatre
enfila sa tunique, blanche comme ses autres vêtements, sous le regard gourmand
d'Heero qui trouvait que la nudité de son amant aurait pu être beaucoup plus
utile sans toutes ces inutiles barrières de tissu, quelques soit leur couleur.
Il aurait aimé assister à cette fête, mais ils n'en avaient jamais parlé
ensemble et il ignorait si c'était un bonne idée. Quatre, lui, comme Réléna à
plusieurs couloirs de là, pensait que tout se jouerait aujourd'hui et il
voulait partager cette – probablement dernière – journée avec son amour, son
amant, sa moitié sans laquelle il ne se sentait pas complet.
-
Heero, comme tu le sais aujourd'hui je ne
pourrai pas être avec toi directement, mais je veux que tu assistes aux
réjouissances. Puisque, depuis quelques temps déjà, tu sais où tu te trouves je
pense que tu veux voir « mon » monde de tes propres yeux.
-
Oui! Mais comment?
-
Il faudra que tu restes caché, mais si tu es
discret, tu pourras voir ce que seul les tanapuriens connaissent. Dans toutes
les salles où nous irons, il y a des colonnes, il est facile de se cacher
derrière, je le faisais quand je n'avais pas encore le droit de participer à la
fête en entier, quand je devais juste apparaître au balcon. Et à ce moment-là,
quand nous serons tous debout devant les habitants du bourbier, tu pourras te
cacher dans un renfoncement qu'il y a sur le mur gauche. Si tu es repéré,
appuie sur la pierre jaune, un passage secret s'ouvrira. Il conduit soit au
sommet de la tour de Tanapura, soit en bas. Mais je ne sais plus quel chemin
mène à où.
-
Je comprend. Je me ferai si discret que même toi
tu oublieras ma présence!
-
Ne me sous-estime pas! Nargua Quatre en enlaçant
son petit brun. Eh oui, en un an, il était devenu plus grand qu'Heero qui, lui,
n'avait presque pas grandi. Leurs cheveux avaient poussé aussi. Mais sinon, ils
n'avaient pas changé.
Un
coup frappé à la porte les arracha à ce moment de quiétude.
-
Maître Quatre, il faut y aller maintenant.
-
J'arrive! Il ajouta pour Heero, suis-moi discrètement.
_ _
_
Les
cérémonies étaient en fait une longues série de longues messes dédiées chacune
à un des quatre dieux élémentaux et au cours desquelles il fallait écouter les
litanies des chanteuses, l'office du grand prêtre et les nombreuses prières de
l'assistance. Elles avaient toutes lieu dans différentes chapelle; une par
dieu. Les décoration et les matériaux utilisés lors de leur construction
évoquaient la divinité.
Des
saphirs, des topazes et des aigues marines pour le dieu de l'eau.
Des
émeraudes et du jade pour le dieu de la terre.
Des
rubis, de l'ambre et même de l'or pour le dieu du feu.
Des
diamants et du cristal pour le dieu de l'air.
Heero
entra dans chaque chapelle à la suite de la procession et dans chacune d'elle
il pleura, dissimulé derrière sa colonne. Un seul mur d'une seule de ces
chapelle aurait suffit pour atténuer, voire même gommer, la misère des
habitants d'en bas, mais les tanapuriens préféraient garder ces richesses pour
eux pendant que les « bourbien » mourraient de faim en tentant de
survivre. Quatre et Réléna l'avaient recueilli, ils n'étaient pas comme les
autres mais ils ne faisaient rien non plus. Il fallait que Quatre change le
monde. Il l'espérait tellement! Il avait tellement confiance en lui et en ses
capacités. Les tanapuriens n'avaient pas le droit de manger au cours de cette
journée consacrée au recueillement et à la pureté, c'est pourquoi la fêtes des
étoiles durait toute la journée sans interruptions. Il fallait honorer
dignement les dieux mais, hélas, il n'était pas question d'absolution des
péchés au grand désespoir des enfants du dirigeant de la ville qui aurait vu
leurs soucis s'envoler et qui ne pouvaient rien faire pour retarder
l'écoulement fatidique des heures qui passaient. Chacune d'elles les rapprochaient
de la fin de la journée.
_ _
_
Heero
se glissa in extremis dans le renfoncement dont lui avait parlé Quatre, trop
heureux de pouvoir assister à la cérémonie ailleurs qu'en bas, simple garçonnet
perdu dans la foule. Par mesure de précaution, il chercha du regard la pierre
jaune. Elle se trouvait juste à hauteur de ses yeux.
Les
notables s'avancèrent et furent accueillis par un tonnerre d'applaudissements
et de cris mêlés aux pleurs des bébé et des enfants en bas âge que les parents
avaient emmené avec eux. Toute ceux de la ville basse pouvaient voir ceux à qui
il devait obéissance, après quatre années de vide. C'était toujours le même
homme qui était au commande et il était toujours accompagné de son fils, ce
beau garçon blond.
-
Habitants de la ville basse, voici quatre ans
que...
Quatre
n'écoutait déjà plus, il cherchait Heero du regard et fut soulagé de le voir
dans sa cachette. Il vit également Réléna qui avait l'air aussi mal à l'aise
que lui. Discrètement, ils se reculèrent pour se rapprocher du brun. Le balcon
était long mais étroit. Même tout au fond, les bourbiens voyaient encore très
ce qui se passait sur le balcon.
-
Comme le veux la tradition, nous allons vous
montrer nos ailes, cadeaux divins fait à notre race, nous donnant le droit de gouverner
et dont la blancheur témoigne de notre pureté.
Tous
sortirent leurs ailes. Du blanc au gris clair, il y avait beaucoup de nuances
différentes. Mais le pesant silence de la foule inquiétait Treize. Que se
passait-il? Des murmures révoltés parcoururent les bourbiens et le seigneur de
la cité se tourna vers ses enfants.
Seigneur
non! Leurs ailes! Les ailes de son fils! Il ne pourrait jamais prendre sa suite
avec des ailes d'une telle couleur. Et sa fille! Que c'était-il passé.
Avait-elle à nouveau désobéi pour aller retrouver ce vaurien d'en bas?
Quatre
et Réléna baissaient la tête. Heero était horrifié. C'était de sa faute si son
amie et son amant avaient des ailes aussi foncées. Celles de Quatre était
encore plus sombres que celles de sa sœur. Personne ne parlait. Personne n'en
était capable. C'était la première fois que les bourbien voyaient des ailes
pareilles. Les tanapuriens aussi. Les deux jeunes gens mirent cette suspension
du temps à profit pour s'enfuir par le passage secret précédés d'Heero. Treize
connaissait l'un des aboutissement de ce tunnel. Il ordonna à ses gardes
d'aller arrêter ses enfants et, n'ayant pas d'autres choix, de les exécuter. Il
avait si mal d'être obligé de donner un tel ordre. Mettre à mort sa propre
chair. Sa femme l'avait prévenu qu'être roi n'avait pas que des avantages et sa
charge ne lui avait jamais parue si lourde. Pourquoi? Il s'effondra à genoux,
et laissa des larmes de douleurs glisser sur ses joues. Il avait perdu sa femme
et maintenant, il perdait ses enfants. Pourquoi?
_ _
_
La
lourde porte de pierre se referma sur eux, les laissant dans le noir. Réléna
sortit un briquet de sa poche, chercha à tâton les flambeaux accrochés aux murs
et les alluma.
-
Qu'allons-nous faire maintenant? Demanda Réléna
en tendant une flamme à Quatre.
-
Où mène ce chemin? Fit Heero en montrant un
couloir.
-
Je crois que c'est le tunnel qui mène à la ville
basse. Répondit la jeune femme.
-
Je pensais que c'était l'autre! Dit froidement
Quatre. Heero et moi partons par là, toi fais comme tu veux. Il agrippa son
amant par le bras et le tira à sa suite dans le tunnel qu'il croyait être le
bon.
« Adieu
Heero. Adieu petit frère » murmura Réléna en s'engouffrant dans l'autre
tunnel. Elle savait que plus jamais elle ne les reverrait.
Elle
suivit le tunnel. Il était étroit et humide ce qui ne lui félicitait pas la
marche et plusieurs fois elle faillit tomber, mais finalement, elle aperçut de
la lumière et pût revoir la lumière du soleil. Elle manqua crier de joie en
regardant autour d'elle. Elle ne s'était pas trompée, il s'agissait bien du
tunnel menant au bourbier. Elle était donc libre?
Mais
Quatre et Heero?
Quatre
n'aurait qu'à s'envoler pour les mener en lieu sûr, ils avaient assez d'avance
pour être déjà loin quand les gardes arriveraient. Elle ne s'en faisait pas
pour eux, même si une boule se formait doucement dans sa gorge. Elle avait beau
se dire qu'ils vivraient heureux loin d'ici, elle ne pouvait empêcher un
étrange et mauvais pressentiment de l'assaillir. Elle erra dans les rues ne
sachant pas où aller, se demandant si elle n'aurait pas mieux fait d'aller les
aider au cas où, de les ramener dans le bon chemin. Puis peu à peu, les brumes
de décors auxquels elle faisait attention lui devinrent plus familières, plus
nettes. En d'autres temps, elle était déjà venu ici. Elle commença à courir
vers une direction connue d'elle seule, bousculant quelques passants mais
partant trop vite pour les entendre râler, sûre de sa destination. À gauche. À
gauche. À droite. Un cul de sac! Demi-tour. À gauche. Le troisième immeuble de
la rue. La deuxième porte, celle qui n'a pas de verrou. Monter les escaliers
jusqu'au deuxième étage. Troisième porte à droite. Elle ouvrit la porte si
violemment que le propriétaire des lieux, surpris, lâcha l'assiette qu'il
tenait dans les mains.
-
WUFEI!!!!
L'assiette
se brisa sur le sol mité et poussiéreux en un milliers de petits morceaux, qui
tel un milliers de miroirs, reflétèrent les retrouvailles passionnées des deux
amants séparés.
_ _
_
Le
tunnel n'en finissait pas. Heureusement que la flamme qui leur permettait
d'avancer ne vacillait pas, il n'y avait aucun gaz dangereux et ils ne
risquaient rien d'autre que de mourir d'épuisement en essayant de gagner la
sortie. Quatre en avait assez de marcher. Il avait en tête une autre activité
qui nécessitait bien plus de contact avec son amour que sa main dans la sienne,
sa raison lui disait que ce n'était pas le moment mais son cœur lui criait que
ce serait peut-être la dernière fois. Comme à chaque moment qu'il passait avec
son brun adoré, il écouta le second, se retourna vivement et plaqua son amant
contre le mur humide et froid. Ils oublièrent tout ce qui n'était pas l'autre
et s'offrirent corps et âme, à nouveau, oubliant pour un temps l'interminable
boyau de pierre dans lequel il se trouvait.
Ils
prirent à peine le temps de se rhabiller, ils avaient perdu assez de temps, et,
même si aucun d'eux ne le regrettait il fallait quand même qu'ils sortent de là
au plus vite. Le jour commençait à apparaître au loin et ils hâtèrent le pas,
plus pressé que jamais.
La
déception se peignit sur leurs traits. Ils étaient au sommet de la tour de
Tanapura, situé au bord d'un gouffre que les conte pour enfant disaient sans
fond et dont les anciens disaient qu'il conduisait droit en enfer et où, il y a
longtemps, on jetait les criminels pieds et poings liés. Elle marquait la fin
de la falaise tanapurienne et le début du néant. Jamais personne n'était allé
au delà de ce précipice. Au loin, le soleil achevait lentement sa course
laissant la place aux astres de la nuit, baignant le monde de sa lumière rouge
orangée.
-
C'est magnifique!
Heero
était fasciné par le paysage qui s'offrait à lui. Jamais il n'aurait pensé
avoir, un jour, la possibilité de contempler un tel spectacle. Quand il faut se
battre pour manger, admirer le coucher du soleil n'est pas, à proprement parlé,
une priorité.
-
Oui! Se contenta de répondre Quatre en serrant
plus fort sa main sur celle de son unique amour.
L'harmonie,
la magie de ce moment fut brisé par le bruit des gardes de Treize. Ils venaient
chercher les fuyards. Acculés au bord du gouffre, les deux amants n'avaient
aucun moyen de fuir. Enfin, c'est ce que Heero croyait jusqu'à ce que Quatre
sorte ses ailes. Leur couleur fit reculer les gardes; un sombre démon s'était
glissé parmi les anges. Le blond souleva délicatement l'homme de vie sous le
regard incrédule des soldats et se laissa tomber dans le vide, emportant avec
lui, serré contre son cœur, son bien le plus précieux.
-
QUATRE!!!! Bats des ailes!!! Hurla Heero,
terrifié, en se cramponnant de toutes des forces aux épaules de Quatre.
-
Je....Je ne peux...pas!
Les
crimes de Quatre venaient de le rattraper, ses ailes refusaient de le porter.
De les sauver. Les deux amants se serrèrent l'un contre l'autre, c'était la
fin. Ils s'embrassèrent, échangeant ainsi toute la puissance de leurs
sentiments. Ils étaient enfin ensemble et pourraient le rester pour toujours.
L'esprit brumeux, comme endormi, Heero pensa que si ce gouffre était vraiment
sans fond, il tomberaient, tomberaient sans jamais s'arrêter, jusqu'à ce qu'il
ne soit plus que de la poussière, leurs deux corps mélangés, emportée par le
vent.
_ _
_
Réléna
se réveilla au petit jour dans les bras de celui qu'elle n'avait jamais cessé
d'aimer. Elle ne prit pas la peine de se couvrir quand elle se leva et ouvrit
les fenêtres, exposant son corps nu aux rayons du soleil levant, alors que
dehors une pluie de plumes noires s'abattait sur le monde.
_ _
_
Ils
tombèrent, étroitement enlacés. L'histoire ne dit pas s'ils touchèrent le fond
un jour, mais certaines vieilles femmes prétendent avoir vu, un beau matin, un
magnifique ange aux lumineuses ailes dorées, portant un jeune homme dans ses
bras, sortir du trou sans fond et s'envoler vers le paradis.
FIN
Katoru87
« qui ne sait pas quoi rajouter »